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Emprégnation ensignative
Si l’emprégnation désigne cette relation physique de cause à effet établie entre deux aspects d'une même entité, ou entre celle-ci et sa représentation, l’emprégnation représentative se greffe de surcroît sur chacune des cinq modalités de représentation déjà répertoriées ici, sans lesquelles elle ne peut s’établir (de même qu’une ressemblance ne suffit pas à construire une figuration, une relation de dépendance n’entraîne pas à elle seule l’installation d’une emprégnation représentative). Par ailleurs, l'ensignation suppose une relation arbitraire entre représenté et représentant.
Markus Raetz, Ceci cela, laiton et miroir, 1992-1993.
Sous cet angle de vue, la sculpture accrochée au mur représente plusieurs lettres formant le vocable "ceci". En constatant qu'elle puisse fournir la lecture d'un autre mot ("cela") en se réfléchissant dans un miroir nous sommes amenés à déduire que nous avons à faire à une emprégnation d'un type particulier.
En effet si nous nous ne pouvions voir que le reflet, l'image proposée (nous permettant de lire "cela") nous apparaîtrait relever de l'emprégnation figurative (provoquée sans doute par le mot "cela" inversé).Mais le rapport que cette réflexion entretient ici avec l'objet contigu responsable de son apparition est d'une tout autre nature. Comme il existe bien une relation de dépendance physique entre la sculpture et son reflet mais sans qu'aucune analogie sensorielle n'intervienne dans les conditions proposées (c'est-à-dire sous cet angle de vue), nous en déduisons qu'il s'agit plutôt d'une emprégnation ensignative. En effet, chacune des lettres se trasnforme en une autre lettre sans un quelconque rapport entre elles (deux plans perpendiculaires étant utilisés pour les traiter à chaque fois) : ainsi le "i" devient un "C", le "C" devient un "E", le "E" devient un "L" et le "C" devient un "A" (bien entendu, l'assemblage des lettres n'est en revanche pas arbitraire et trouble d'autant plus notre perception). Intrigués, nous cherchons à comprendre comment une telle relation est possible et nous parvenons dans un second temps à déduire les formes dans l'épaisseur des quatre éléments de la sculpture (formes inaccessibles de ce point de vue puisqu'elles sont cachées par les surfaces visibles qui se détachent du mur, mais néanmoins révélées par les ombres, si nous y faisons attention).