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Stratifiées
Conception du 1% artistique (projet préselectionné) pour le Centre des Archives historiques de la Nièvre à Nevers.
Cinétique N°2 (2008), Version n°1 (2008), dispositif combinant les Répliques N° 3, 7, 19 et 31 ; stores blancs, rouges, bleus, jaunes et vinyles microperforés bleus, jaunes et rouges.
L'oeuvre est constituée d'une série de mots inscrits sur la façade. Leurs graphèmes sont ont été travaillés pour que les lettres qu'ils constituent puissent s'inverser de façon à permettre une lecture des mêmes mots de chaque côté des vitres, aussi bien de l'intérieur (dans la salle de lecture ou les bureaux) que de l'extérieur. Les rectangles de la bande horizontale inférieure sont disposés en quinconce par rapport à ceux de la bande supérieure. Ce qui permet aux stores de couleur, lorsqu'ils sont baissés, à la fois de prolonger verticalement chacun des rectangles colorés inférieurs, et de parfaire la continuité de la bande horizontale, entre les rectangles de laquelle ils se glissent (Simulations : Stéphane Morali).INTÉGRATION DE L'ŒUVRE DANS SON ENVIRONNEMENT
Je travaille in situ et tiens toujours compte de l'articulation de l'oeuvre à son lieu d'accueil au point que l'oeuvre ne peut jamais exister sans son support puisque celui-ci offre les possibilités de reflets, de transparence ou d'inversion nécessaires à l'accomplissement des Répliques.
L'oeuvre s'intègre plastiquement de manière idéale comme on l'a vu à l'intérieur des lignes de force des éléments visibles en façade, puisque la structure des bandes colorées qui organise le dessin d'ensemble des différentes Répliques assemblées est conçue en combinant la trame vitrée et les rangées de stores verticaux.
Mais l'oeuvre s'intègre non moins sémantiquement, et de manière à satisfaire un ensemble de raisons liées autant aux fonctions du bâtiment qu'à ses caractéristiques physiologiques.
Je n'ai pas l'intention d'illustrer au premier degré les fonctions du bâtiment mais elles doivent être néanmoins suggérées afin de permettent à l'observateur d'avoir envie de creuser. Elles sont donc indirectement évoquées de façon à créer des lectures nouvelles selon le degré d'insistance de nos questionnements : avec le mot « rétroaction » inscrit en façade, la manière d'archiver le passé est ainsi mise en valeur. En effet l'archivage crée inévitablement des effets de feed-back : le point de vue contemporain permet de repenser autrement les faits anciens qui en retour transforment notre vision des événements actuels.
L'« alternative » désigne celle que nos recherches sont amenées à découvrir dès lors que nous plongeons dans les archives historiques, les textes incitant à faire découvrir des versions multiples de faits uniques, des comptes rendus et des points de vue aussi divers que variés.
La façade du bâtiment est également mise à contribution par l'emploi du vocabulaire exhibé : le « transparent » de sa façade et par conséquent celui qui présente, en alternance, l'entourage des lettres et leur évidemment.
L'oeuvre exacerbe non moins la différence qu'il résulte par nature entre la transparence du bâtiment et les reflets simultanés du paysage ou des bâtiments voisins répercutés en façade.
Les découpes des lettres dans les rectangles réussissent en effet à cadrer les éléments situés à l'intérieur du bâtiment et qui sont visibles à travers les vitres. Quant aux surfaces colorés, elles se situent derrière le vitrage et forment ainsi un fond qui souligne les reflets des environs autrement beaucoup moins repérables.NATURE DE L'ŒUVRE ET FONDEMENTS DE SON CONCEPT
L'oeuvre est constituée d'une série de mots inscrits sur la façade. Leurs graphèmes sont ont été travaillés pour que les lettres qu'ils constituent puissent s'inverser de façon à permettre une lecture des mêmes mots de chaque côté des vitres, aussi bien de l'intérieur (dans la salle de lecture ou les bureaux) que de l'extérieur.
Cette succession d'ambigrammes (signes à points de vue multiples du fait de la réversibilité de leurs constituants) alterne sur deux niveaux, formant deux bandes horizontales discontinues dont l'une est située au premier étage et l'autre au niveau du troisième.
Chaque mot est repérable grâce aux couleurs distinctes qui délimitent son territoire. Il est constitué d'une alternance de lettres pleines qui se détachent sur la transparence des vitres, et de lettres évidées à l'intérieur d'un rectangle coloré.
La largeur de chaque rectangle correspond à la largeur d'une vitre. Les rectangles de la bande horizontale inférieure sont disposés en quinconce par rapport à ceux de la bande supérieure. Ce qui permet aux stores de couleur, lorsqu'ils sont baissés, à la fois de prolonger verticalement chacun des rectangles colorés inférieurs, et de parfaire la continuité de la bande horizontale, entre les rectangles de laquelle ils se glissent. Cela ne modifie pas la perception des lettres de la bande la plus basse (elles apparaissent pleines colorées ou évidées sur fond coloré), mais celles de la bande du dessus deviennent dans ce cas intégralement blanches (alors qu'en l'absence des stores elles sont blanches ou transparentes).
C'est parce que l'oeuvre a été déduite des contraintes multiples fournies par les fonctions du bâtiment, ses aspects plastiques, techniques et structurels, que les solutions se sont imposées.
Je voulais que le résultat dans sa globalité paraisse relativement simple ou pour le moins évident dans sa plasticité, donnant l'impression que le bâtiment avait été construit exprès pour l'accueillir. Mais je voulais également produire dans le détail une certaine complexité nécessaire pour satisfaire les sens aussi bien que l'intelligence. C'est pourquoi le tressage des signes sémantiques, des trames plastiques et des fonctions du lieu d'accueil ont pris une place tout aussi essentielle.
Si la transparence de la façade était l'élément le plus évident pour impliquer une bonne réception des Répliques et leurs lectures réversibles, en revanche les stores visibles de l'extérieur étaient plus difficiles à intégrer, et j'aurais estimé totalement irresponsable de ne pas en tenir compte.
Il m'est vite apparu que les stores, au lieu de se présenter comme des éléments parasites ou rajoutés, devaient au contraire acquérir des fonctions multiples et essentielles à l'appréhension de l'oeuvre même.
Le dispositif que je propose permet ainsi de leur donner plusieurs rôles, celui d'éléments fédérateurs, de sondes et d'agents de liaison.
Leur rôle d'éléments fédérateurs consiste à regrouper les deux bandes horizontale grâce à leur agencement en quinconce dans un même ensemble plastique constitué de croisements. Les stores y parviennent en prolongeant les rectangles colorés du dessous et en s'infiltrant entre ceux du dessus.
Leur rôle de sondes est également évoqué par le fait qu'ils descendent le long du bâtiment lorsqu'ils sont baissés et semblent ainsi fouiller des strates du passé (comme une sonde explorant la profondeur d'un sol inconnu jusque-là) qui sont concrétisées par les blocs de graphèmes en apparence fragmentaires du fait de leur états positifs ou négatifs.
Leur rôle d'agents de liaison consiste à relier les différents éléments des mots de la bande supérieure. Cela s'effectue grâce à deux opérations : en s'infiltrant entre les rectangles colorés les stores de couleur donnent l'impression de cacher les rectangles colorés intermédiaires manquant et font ressortir le blanc des lettres pleines inscrites sur les vitres. Ils permettent ainsi de donner le sentiment d'une bande horizontale continue sur laquelle est inscrite un mot entier et homogène. De surcroît, en passant derrière les lettres transparentes évidées dans les rectangles, les stores blancs servent de fond à ces mêmes lettres les transformant de telles façon qu'elles paraissent tout aussi blanches que leurs directes voisines.
Le dispositif plastique réussit donc à désigner visuellement les sondes verticales des strates historiques et les assemblages horizontaux des classements contemporains.
Enfin, il existe une autodésignation des mots vis-à-vis d'eux-mêmes, puisque le sens qu'ils véhiculent rend compte de certains de leurs aspects (la transparence ou leur réversibilité) ou de certaines conditions de leurs lectures (la rétroactivité de leur perception, l'alternative des points de vue).
LES FONDEMENTS DE L'ŒUVRE ARTISTIQUE REPOSENT DONC SUR UNE VISUALISATION DES FONDEMENTS MÊMES QUI CONSTITUENT LA BASE DU CENTRE DES ARCHIVES HISTORIQUES